Roses and Ruins
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 (aron) bolt, hammer and screwdriver

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Juniper Anderson
Juniper Anderson

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Pseudo : Pauline
Avatar : Elisabeth Olsen (jenesaispas)
Multinicks : Anya Larsen
Disponibilité : Fréquente
Âge : Trente ans
Adresse : Une petite baraque sur l'île de Götland, qu'elle a acheté avec ses économies et qu'elle retape, au fur et à mesure, tout en s'occupant de son jardin.
Occupation : Propriétaire de la librairie anglophone Austen&Co.
Réputation : La nouvelle venue, plus si nouvelle que ça, qui s'est décidée à reprendre la librairie sur le point de fermer. L'américaine qui semble sourire presque tout le temps et dont on ne sait pas grand chose, à vrai dire, si ce n'est qu'elle vit retirée sur l'île, qu'elle n'a pas de famille, qu'elle aime le thé, les biscuits, et bien sûr les livres.

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MessageSujet: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyLun 21 Jan - 21:25

 « Aron ? Aron, tu es là ? » Juniper toque à la porte, quelque peu échevelée, emmitouflée dans un pull qui dissimule sa vieille salopette, le tout caché sous un de ces anoraks bien chaud qu’elle semble porter à toute heure de la journée, pour aller faire ses courses ou pour bricoler sur la cabane. Son vélo est appuyé contre la barrière, quelques mètres plus bas - la peinture s’écaille, sur le cadre, mais il roule, et c’est tout ce qu’elle lui demande. Le chemin, tout juste dégelé, était bordé de neige et elle a bien failli glisser une fois ou deux - mais elle est tenace, Juniper, si tenace qu’elle a continué à pédaler et n’a mis pied à terre qu’en arrivant chez Aron. Ce n’est pas la première fois qu’elle débarque, la mèche de travers et les joues roses, pour lui demander un coup de main : Aron fait partie de ces voisins serviables qui, depuis qu’elle est arrivée, passent parfois la voir pour lui donner un conseil, lui passer une latte ou lui prêter un tournevis. Mais Aron, c’est aussi le tenancier du pub et une sorte d’ours aimable, de demi-campagnard, d’exilé du week-end à qui elle pourrait bien faire un gâteau et offrir un café. Aron est Aron, spécimen unique que la libraire a vite appris à apprécier et, quand il ouvre la porte, elle lui adresse un sourire à la fois ravi et soulagé.

« Désolé, vraiment, je sais que tu dois vouloir te reposer mais ça fait trois fois que je manque de m’électrocuter et je comprends pas ce qui ne marche pas. Je crois que j’ai mal rebranché les arrivées de la cuisine mais franchement, je ne sais pas. Je te promets que je te fais une cafetière entière, j’ai même des bières et du gâteau au chocolat pour me faire pardonner. » Et Juniper reprend son souffle, qui est un peu court depuis qu’elle a cessé de pédaler, et affiche cet fois un air presque gêné. Aron doit certainement avoir d’autres choses à faire : il lui a dit, une fois, autour d’un bout de toit percé, qu’il aimait venir sur Gotland le week-end pour profiter de la campagne, du calme de l’île, de sa petite cabane qui est tout de même un peu mieux équipée que la sienne - bien que la maison de June ne soit pas vraiment une cabane et ressemble plus à un chalet, un joli petit chalet sans cesse en travaux, jamais terminé, chaque semaine amélioré. « Ou je t’invite à déjeuner, tiens, si tu ne meurs pas avant. Je m’en voudrais de te pourrir complètement ton week-end. »

Juniper n’est pas désespérée mais elle a appris, au fil du temps, surtout cette année, à demander de l’aide. Ce serait malhonnête de dire qu’elle n’apprécie pas Aron, qu’elle n’apprécie pas l’air qu’il arbore quand elle débarque, préoccupée par un foret qui lui manque, par un évier quelque peu décalé, par la plomberie qui s’est mise à fuir. Et le sourire qu’elle finit par afficher, oubliant ses problèmes de fils mal arrangés, est un peu malicieux, un peu amusé, comme si le déjà-vu entretenait entre eux une sorte d’intimité, d’anecdote que l’on raconte, des années plus tard, autour d’un verre.
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Aron Strömquist
Aron Strömquist
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Adresse : un appart exigu sur södra kyrkogatan la majorité du temps ; s'enfuit dans sa maison au sud de Gotland dès qu'il en a l'occasion.
Occupation : gérant du black sheep.
Réputation : l'ours mal léché de Visby. déteste les touristes. sait tout ce qu'il y a à savoir sur la ville. offre parfois une pinte aux âmes esseulées de la ville. te sourira jamais mais serait prêt à réparer ton installation électrique.

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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyVen 25 Jan - 17:39

Spoiler:

Ses rêves étaient peuplés de rivières gelées, d’oeufs de saumon, de feux de camps et d’élans. Son père, en costard-cravatte, pêchait avec beaucoup de détermination au milieu d’un lac et la glace cédait brutalement sous son poids. Alors qu’Aron essayait de sauver son père — pourtant parfaitement calme — de la noyage, Gala l’appelait avec agacement depuis la rive pour qu’il vienne l’aider à préparer le nouveau brunch vegan. Sans transition, il retrouvait Annika devant une carcasse de sanglier éventré, sans plus d’explications. Son amie l’interrogeait du regard avec inquiétude, « bon on fait quoi de ce truc, Aron? » en tapant du pied contre une souche d’arbre. Toc, toc, toc. La jeune femme semblait impatiente. Toc toc toc…

Le bruit se fait plus clair, plus précis, plus fort. Aron émerge brusquement sa sieste, son roman écorné étalé sur le visage, à la page où il avait cédé à au sommeil. La fatigue et les romans de nature writing ne font visiblement pas bon ménage : le Montana en plein hiver était devenu la toile de fond de ses rêves et de ses cauchemars. Les coups à la porte retentissent une nouvelle fois, et Aron finit par se redresser sur son canapé, engourdi. Les cendres du poêle sont encore fumantes et il voit à travers la fenêtre du salon que la lumière du ciel commence à changer de couleur : il doit être 16h, tout au plus. Rassemblant son énergie, il se lève avec un soupir, et s’approche de la porte d’entrée. « Aron ? Aron, tu es là ? » A travers la petite fenêtre découpée dans le vantail, il reconnait sa voisine et ne peut pas s’empêcher d’esquisser un sourire. Elle ne le voit pas tout de suite et semble scruter les environs — se demandant probablement s’il y a quelqu’un à la maison. Aron s’octroie quelques secondes supplémentaires hors de sa vue, étire son cou et ses épaules endormies, passe ses mains sur son visage pour en retirer les dernières traces de sommeil.

Lorsqu’il ouvre finalement la porte, une vague de froid lui mort le visage mais il ne laisse rien paraître, préférant adresser un sourire un peu taquin à Juniper. Avant qu’il n’ait le temps de la saluer en bonne et due forme, elle se confond en excuses, le noie sous les informations, s’excuse à nouveau. Une histoire de problème électrique, apparemment. Il sourit silencieusement, attend qu’elle termine sa petite tirade, se frotte un oeil. S’il s’était fait réveiller par n’importe qui d’autre, il aurait sans doute claqué la porte au nez du malotru sans aucune espèce de cérémonial. Mais il y avait chez Juniper cette spontanéité toute américaine qui était particulièrement rafraîchissante — quoique très déroutante — pour quiconque avait vécu toute sa vie en Suède. Ici, on saluait ses voisins de loin. On prenait soin de ne pas imposer sa présence aux autres, de ne jamais avoir l’air d’en faire trop. La jeune femme était arrivée assez récemment pour ne pas encore avoir pris le pli du lagom suédois, et son énergie était communicative. Elle lui promet toutes sortes de choses à manger et à boire pour le dérangement. « Ou je t’invite à déjeuner, tiens, si tu ne meurs pas avant. Je m’en voudrais de te pourrir complètement ton week-end. » Juniper ponctue sa proposition d’un sourire plein d’espièglerie, et il a l’impression à cet instant qu’il ne pourrait rien lui refuser.

Sans se prononcer tout de suite sur son invitation, il finit par répondre : « Pas de problème, je cherche du matos et je te rejoins à ton vélo. » Il enfile un pull par dessus son tee-shirt, une paire de chaussures et son gros blouson, puis se rend dans la petite remise accolée à sa maison. L’endroit regorge d’outils et de matériaux récupérés « au cas où », mais il ne lui faut qu’une petite minute pour trouver une pince et un tournevis, qu’il s’empresse de fourrer dans son sac à dos avec quelques autres bricoles qui pourraient s’avérer utiles. Il attrape la bicyclette qui l’attend sagement contre la remise et rejoint sa voisine une dizaine de mètres en contrebas.

Les maisons du coin sont juste suffisamment espacées pour ne pas sentir la présence de ses voisins, mais assez rapprochées pour ne pas avoir la sensation d’être complètement isolés. Il ne faut que cinq petites minutes pour rejoindre le chalet en bois de Juniper, lové au milieu de sapins. Ils échangent quelques plaisanteries, Aron lui fait remarquer en arrivant que son toit à l’air en grande forme — sa dernière visite remontant à quelques semaines plus tôt, lorsqu’il l’avait aidé à calfeutrer un trou dans la toiture — et les voilà déjà dans la cuisine. Retrouvant momentanément son air sérieux, il pose son sac dans coin de la pièce et s’approche de la prise électrique qui semble être la cause de tous les malheur de Juniper. Le cache-prise gît au sol, et plusieurs fils dénudés sortent de la prise qui ne semble tenir au mur que par une action divine. Prudemment, il entreprend d’enlever la prise pour voir ce qui l’attend derrière, « Je sais pas ce que t’as fait mais tes fils Anderson, mais là, je peux déjà te dire que ça respecte aucune norme d’aucun pa-aaaAAAAH PUTAIN! », et déjà une puissance décharge électrique lui traverse le bras, contractant ses muscles jusqu’à l’épaule. Aron se plie en deux, secoue son bras pour faire passer le fourmillement douloureux. Juniper le regarde avec effroi, et avant qu’elle n’ai le temps de lui présenter de nouvelles excuses, il ajoute, narquois : « Avant toute chose, on va commencer par couper le courant. »
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Juniper Anderson
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyDim 27 Jan - 21:14

 Aron dormait, Juniper en est à peu près certaine. Quand il lui ouvre la porte, il porte encore sur son visage les traces du sommeil - les paupières tout juste gonflées, les yeux un peu moins vifs que d’habitude et ce petit sourire, endormi aux coins des lèvres, qu’il lui adresse à chaque fois qu’elle vient le déranger avec un problème, une question, la recherche d’un conseil. Il ne dit rien, Aron, la laisse parler, déblatérer presque, et se contente de sourire, là, immense dans le cadre de la porté et June soupire presque de soulagement quand il accepte de venir. Elle ne sait pas pourquoi, puisqu’elle n’en doutait pas vraiment. Bien qu’il apparaisse comme un ours - et qu’on le dépeigne souvent ainsi -, la jeune femme ne connaît d’Aron que ce côté serviable, pragmatique et aimable. Elle n’a que rarement le temps d’aller au pub, les heures sont parfois longues à la librairie et Juniper ne boit pas - plus - d’alcool, si bien qu’Aron Strömquist est pour elle un voisin, avant d’être le propriétaire du Black Sheep. Et comme voisin, on fait difficilement mieux. June recule, un sourire aux lèvres, quelque peu malicieux : « Tu me sauves la vie. Et désolé de t’avoir réveillé. »

Il ne leur faut qu’un instant pour traverser la distance entre leurs deux maisons, quelques mètres qui leur donnent un peu d’intimité mais leurs permettent, si l’envie s’en fait sentir, de venir toquer à la porte de l’autre pour prendre un café. Peut-être ne se connaissent-ils pas encore assez pour cela, et Juniper se dit qu’elle aimerait bien ça - qu’Aron s’invite parfois comme peuvent le faire Joanne ou Annika. Si la cabane lui apparaît comme un refuge, Juniper aime l’idée que l’on puisse l’y trouver, que l’on aime s’y rendre et y passer quelques heures autour d’un thé, d’un café, d’un gâteau qu’elle a décidé de garder pour elle, d’un feu de cheminée. L’idée lui trotte encore en tête quand Aron s’accroupit et se concentre finalement sur le désordre de fil qui émerge, là, du mur de la cuisine. « Peut-être que je devrais… » June n’a pas le temps de finir sa phrase - « couper le courant avant que tu t’y mettes » - qu’elle sursaute, laissant échapper une exclamation de surprise sans même penser à la retenir. Elle n’a pas le temps de récupérer ni d’ouvrir la bouche qu’Aron la regarde, presque amusé - elle a une main sur sa poitrine, où son corps joue au tambour entre ses côtes. « Tu m’as fichu une de ces trouilles. » La tape qu’elle lui assène sur l’épaule en passant est joueuse, faible forme de vengeance alors qu’elle se dirige vers le placard qui dissimule les fusibles de la maison. Quelques secondes s’écoulent avant que la maison ne soit plongée dans l’ombre de la fin d’après-midi.

« Promis, quand on a fini, je t’offre une bière. Ou je te fais un café. Ou un chocolat chaud avec des guimauves, si tu préfères. » Juniper affiche un sourire taquin alors qu’elle vient s’accroupir près de son invité-sauveteur-bricoleur, observant les fils qu’elle a passé presque une heure à triturer. « Et ne critique pas mon travail, c’est artistique. Tu ne verras jamais ça ailleurs ! » Et elle ne saurait mieux dire : si elle sait bricoler un moteur, monter un mur, et peut se débrouiller dans son jardin, Juniper se bat sans cesse avec l’installation électrique de sa maison. « Je me demande des fois si celui qui a fait cette maison s’y connaissait mieux que moi. Entre ça et la plomberie, j’en ai pour des mois à tout arranger… » Et au souvenir de l’eau glacée qui lui est tombée dessus le matin-même, le sourire de Juniper se transforme en une grimace désespérée presque comique.
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Aron Strömquist
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptySam 2 Fév - 10:53

Juniper l’abandonne quelques instants, seul sur le carrelage patiné de la cuisine. Il en profite pour lever le nez vers le reste de la pièce : chaque  centimètre carré d’étagère vient accueillir des ingrédients, des ustensiles ou des livres de cuisine dont les tranches, faisant apparaitre des titres en anglais, trahissent l’origine de sa voisine. A travers l’encadrement de la porte de la cuisine, il aperçoit le petit canapé du salon, entouré d’une douzaine de piles de livres, disposées ça et là. Aron ne peut s’empêcher de repenser au vieil Halvar — le précédent propriétaire des lieux. C’était un homme discret, un peu grincheux, qui se laissait rarement approcher mais qui semblait vivre une petite vie paisible dans la maison qu’il avait bâti de ses mains. Une seule fois, seulement, il y de cela deux ou trois ans, Aron avait eu le droit d’entrer sur sa propriété pour l’aider à porter des sacs de terreau dans son jardin, sans jamais lui proposer de franchir le seuil de sa porte. Il avait imaginé l’intérieur rustique, au confort sans doute un peu spartiate. Et il était là, aujourd’hui, sur le sol de ce qui avait été sa cuisine, une odeur de cannelle flottant dans l’air, une bougie parfumée allumée dans la pièce voisine et un petit bouquet de fleurs sauvages ployant dans un vase près de l’évier.

« Promis, quand on a fini, je t’offre une bière. Ou je te fais un café. » Juniper le sors une nouvelle fois de ses songes et entreprend de lui faire la liste de tout ce qu’elle peut lui proposer pour se faire pardonner. Elle réapparait dans la cuisine et conclut : « Ou un chocolat chaud avec des guimauves, si tu préfères. » La pugnacité de la jeune femme l’amuse, et lui lui répond finalement, alors qu’elle vient s’agenouiller à ses côtés : « Ça dépendra de l’heure à laquelle on termine, il est possible qu’on en ait pour toute la nuit vu le foutoir! » Il regrette presque instantanément d’avoir dit ça, pourtant sans arrières-pensées. La jeune femme ne relève pas et se contente de feindre la vexation lorsqu’il évoque l’état de l’installation électrique.

La pièce était plongée dans une semi-obscurité : le soleil d’hiver s’apprêtait à se retirer derrière les collines environnantes, étalant quelques rayons dorés à travers les épais nuages qui tapissaient le ciel. Les ombres projetées à travers les petites fenêtres de la cabane de Juniper étaient de plus en plus longues : rapidement, Aron ne distingua plus grand-chose de ce qu’il faisait, et la jeune femme apporta une bougie en renfort. La discussion était naturelle et ponctuée d’interventions d’Aron — « est-ce que tu aurais du scotch pour maintenir ce fil? » et de questions de Juniper, très investie dans cette intervention hasardeuse — « t’es sûre qu’il n’y a pas de risque de court-circuit, en faisant ça? » Aron se laissait à chaque fois surprendre par la débrouillardise et les (bons) instincts de bricoleuse de Juniper. Il ne doutait pas de la capacité d’une femme à savoir manier des outils — sa propre mère en était la preuve vivante — mais il s’était habitué à être Monsieur Le Bricoleur pour son entourage.

Alors qu’il était sur le point de refixer la prise, il lui lance : « Tu sais, j’ai connu le propriétaire précédent, celui qui a construit cette maison… » Il sent qu’il a capté son attention, et ce n’est pas pour lui déplaire. Il laisse un petit moment de silence s’installer, fait mine d’ajuster le cache-prise, conscient qu’elle est suspendu à ses lèvres. « Je crois qu’il serait rassuré de voir ce que tu en as fait. » Il esquisse un sourire, pose ses yeux sur un mug arborant un portrait de Barack Obama. « Surpris, mais rassuré. »
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Juniper Anderson
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyDim 3 Fév - 20:19

 «Ça dépendra de l’heure à laquelle on termine, il est possible qu’on en ait pour toute la nuit vu le foutoir! » Juniper hausse un sourcil et ravale la remarque bien sentie qui pointe sur le bout de sa langue.  Avec ses frères et soeurs, elle ne se serait certainement pas gêné mais Aron, si elle l’aime bien, n’est encore que son voisin, un ami, peut-être, en devenir, un bricoleur associé. Si bien que June se contente de bouder, faussement vexée - absolument pas vexée -, presque amusée par ce côté ours d’Aron dont elle entend souvent parler. « Si tu te sens de venir refaire toute l’installation électrique, je te fille les clés. » Elle lui adresse un sourire en coin malicieux avant de s’agenouiller à ses côtés. Curieuse, Juniper ne perd pas une miette de ce qui se passe sous ses yeux : elle aime apprendre, elle aime savoir, et les travaux électriques lui échappent encore. La patience lui manque, pour ce genre de minutie - elle préfère la cuisine, les gros travaux, la mécanique, le tricot. Tout, mais pas les câbles qu’elle laisse bien volontiers à son invité du jour.

Les jambes fatiguées, June finit par s’asseoir à même le sol aux côtés d’Aron, posant quelques questions, suggérant quelques manoeuvres ici et là. Il ne faut qu’un instant pour que son chat n’approche à pas feutrés, roux et blanc, blanc et roux, deux grands yeux verts fixés sur les doigts d’Aron. « Darcy, viens-là. Allez, viens. » Avec un miaulement contrarié, la bête approche, s’installe sur les jambes croisées de sa maîtresse et ne bouge plus, les yeux rivés sur les doigts de l’inconnu qu’il commence pourtant à connaître. «  Tu sais, j’ai connu le propriétaire précédent, celui qui a construit cette maison…  » Étonnée, à la fois par le changement de sujet et par la confession de son voisin, Juniper hausse un sourcil, les doigts perdus dans la fourrure de Darcy. Elle veut le laisser continuer - elle aime bien quand Aron parle de lui-même, quand il avance comme son chat, à pas feutrés, bien moins brusquement qu’on ne pourrait l’imaginer. Et la suite la fait sourire sans qu’elle ne cherche même à le cacher.

« Ça me fait plaisir que tu me dises ça. » La phrase lui échappe avec une sorte de tendresse qu’elle ne peut contenir : elle la destine à sa cabane, cette drôle de maison sur laquelle elle a craqué, comme ça, d’un coup, sans vraiment réfléchir. Juniper la regarde : la petite cuisine, le salon confortable, les piles de livres, les fleurs qui vont sont encore fraîches, les plantes qu’elle a mis à sécher. Les bûches qui s’empilent près de la cheminée, la porte de la chambre entrouverte qui laisse apparaître le coin d’un grand lit, d’un plaid, d’une couette épaisse. Juniper aime vraiment sa cabane, plus que son ancienne maison, plus que l’étrange baraque éclectique construite par ses parents. « Vraiment, ça me fait très plaisir. J’ai eu un coup de coeur pour cette maison, quand je suis passée devant. Même avec les travaux, le trou dans le toit, l’état du jardin… Je sais pas, je me voyais bien habiter ici. » Et elle ne regrette pas, pas un seul instant, et ça se voit certainement à la façon dont elle sourit. Darcy râle quand elle se lève et elle lui parle un instant - arrête de faire ta diva, tu veux, va sur le canapé -, tapotant gentiment l’épaule d’Aron. « Je vais faire chauffer de l’eau. » Les épaisses chaussettes qu’elle porte assourdissent le bruit de ses pas et elle est presque aussi silencieuse que Darcy, sur le parquet tiède. Elle lance l’eau pour le thé, ravive les flammes dans la cheminée et revient, s’appuyant contre le mur près d’Aron, l’observant un instant : son profil, la courbe de son nez, ses sourcils, son air concentré. « Tu es de Visby, Aron ? Je ne crois pas t’avoir déjà demandé… Je n’ai pas trop l’occasion de passer au pub en ce moment, tout va bien ? »
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Aron Strömquist
Aron Strömquist
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyDim 10 Fév - 19:34

« Ça me fait plaisir que tu me dises ça. » L’affirmation est sincère, dénuée du sarcasme qui voile la plupart de ses échanges avec ses compatriotes suédois, et plus particulièrement sa famille ou ses amis. Juniper n’avait pas été élevée dans le respect du sacro-sain lagom de son pays, où l’on apprenait très tôt à n’être jamais dans l’excès : ni trop, ni trop peu. Elle disait ce qu’elle avait sur le coeur sans chercher à l’envelopper dans une couche d’ironie — Aron l’avait déjà remarqué, et trouvait cet aspect de sa personnalité plutôt séduisant, il se l’était déjà admis à lui-même. La jeune femme partageait avec lui le récit de son coup de coeur pour sa cabane, et il l’écoutait, les yeux toujours rivés sur ses doigts tortillant des fils, coinçant brièvement la pince entre ses dents lorsqu’il avait les deux mains prises.

« …Je sais pas, je me voyais bien habiter ici. » Il aimait la façon qu’elle avait de décrire sa maison, parce que ce sentiment lui était profondément familier. Lui aussi nourrissait un attachement un peu démesuré pour sa maison, cette bâtisse dans laquelle il avait versé sueur, sang et eau ; qui y avait accueilli ses proches, avait vu naître (puis s’éteindre) plusieurs de ses relations. Peu de personnes dans son entourage — à part ces grands-parents, peut-être — parvenaient à comprendre son affection pour ce morceau de terrain, pour ce tas de bois, de pierre, de mortier et de tuiles. Il était entouré de voyageurs, d’esprits nomades : sa mère, sa soeur, plusieurs de ses amis étaient partis ; puis revenus ; puis repartis. Ils semblaient croire que l’herbe était plus verte ailleurs. Aron, lui, était persuadé que sa place était ici, à Gotland, et avait acheté un lopin de terre dès que ses économies le lui avaient permis. Il devait y avoir quelque chose de primitif là-dedans : la satisfaction d’être propriétaire d’un petit bout de cette île, d’avoir un chez soi, un vrai. Une de ses anciennes petites amies lui reprochait son côté sédentaire, casanier — elle n’appréciait pas particulièrement de passer ses week-end à repeindre le lambris de la façade ou à poser de la faïence dans la salle de bain. Elle l’avait même traité d’homme des cavernes, et l’invective était restée avec lui plusieurs mois après leur séparation, et semblait avoir trouver une résonance dans les relations qui suivirent. Entendre Juniper parler avec passion et tendresse de sa cabane répandait dans son torse une chaleur qu’il n’arrivait pas bien à identifier, mais qui lui vissait un demi-sourire sur le visage.

Il n’ajoute rien, ne répond pas : Aron n’est pas du genre à combler les vides pour fuir le silence. On entend un chien aboyer au loin ; probablement des personnes en ballade venues elles aussi profiter de la sérénité de ce petit coin d’île. Juniper se remet soudain en mouvements, Darcy proteste. Instinctivement, Aron approche ses doigts de l’animal, flatte le dessus de sa tête, gratte son menton. « T’es bien plus mignon que Colin Firth », adresse-t-il au félin, pas totalement certain que Juniper ait effectivement nommé son animal de compagnie d’après un personnage d’Orgueil et Préjugés. Mais c’est une librairie après tout : les chances sont de son côté. L’intéressée effleure son épaule et quelques secondes après, le chuchotement des flammes de la gazinière se fait entendre sous la casserole remplie d’eau. Aron reporte son attention sur les fils de cuivre, avec la ferme intention de terminer sa besogne avant que la lumière naturelle quitte totalement la pièce — il ne lui reste que quelques minutes tout au plus.

Sans qu’il s’y attende, Juniper interrompt sa concentration : « Tu es de Visby, Aron ? Je ne crois pas t’avoir déjà demandé… » Il ne quitte pas la prise des yeux, un peu surpris par la question. « Je n’ai pas trop l’occasion de passer au pub en ce moment, tout va bien ? » Aron pose la pince à côté de lui et se tourne vers Juniper, hésitant. Il n’aime pas particulièrement parler de lui, et n’est pas très bon dans cet exercice. « Oui, ma famille vient de l’île. J’ai toujours vécu ici, enfin presque. » Il n’a aucune envie de s’étendre sur les premières années de sa vie, vécues à Stockholm : une ville qui lui semble bien lointaine et étrangère. « C’est ici que je me sens le mieux. » Un moment de flottement ; Juniper doit sentir qu’il a autre chose à dire. Il ajoute finalement : « Borta bra men hemma bäst. » Le rythme de sa voix est plus assuré et son ton plus chantant, lorsqu’il parle dans sa langue maternelle. Devant la mine légèrement déconfite de Juniper, il traduit, repassant à l’anglais, un rire dans la gorge : « Away is good but home is best, comme on dit par ici. »

Dans sa lancée, il poursuit : « Et pour le pub, ça dépend des jours, mais on tient le cap. » Encore ses réflexes suédois qui prennent le dessus : on n’est pas du genre à faire dans les effusions ici, que les choses aillent très bien (comme c’était d’ailleurs le cas au Black Sheep) ou très mal. « Tu devrais passer, ma soeur met beaucoup d’énergie à rendre l’endroit plus… » il marque une pause puis termine, avec une grimace : « …cosy. »
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Juniper Anderson
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Occupation : Propriétaire de la librairie anglophone Austen&Co.
Réputation : La nouvelle venue, plus si nouvelle que ça, qui s'est décidée à reprendre la librairie sur le point de fermer. L'américaine qui semble sourire presque tout le temps et dont on ne sait pas grand chose, à vrai dire, si ce n'est qu'elle vit retirée sur l'île, qu'elle n'a pas de famille, qu'elle aime le thé, les biscuits, et bien sûr les livres.

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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyVen 15 Fév - 13:46

Aron ne répond pas et Juniper n’est pas gênée par le silence. Longtemps, elle l’a craint, a craint ce qui se cachait derrière, ce qui l’attendait au détour de ces silences qui avaient tendance à s’étirer et s’étirer encore. Longtemps, elle a comblé les silences par une chose ou une autre : un rire, une histoire, une activité quelconque pour garder ses mains occupées. Puis il y a eu les cachets et après les cachets, d’autres cachets encore jusqu’à ce qu’elle perde le compte, qu’elle oublie tout, les silences avec. À Visby, elle apprit qu’ils ne sont pas effrayants et qu’ils ne sont jamais vraiment vides. Il y a toujours un oiseau pour chanter quelque part, un chien pour aboyer au loin, Darcy qui ronronne ou un ami qui respire, dans un coin de la pièce, affairé qu’il est à démêler et rebrancher les fils qui ne semblent pas vouloir marcher. Bientôt, ils n’auront plus de lumière et le travail devra cessé, terminé ou non. Avec la nuit viendra un autre silence, celui qui impose au cerveau de ralentir, celui qui pousse les pensées à se calmer ou, à l’inverse, à redoubler d’effort pour faire du bruit, pour combler, pour cacher les creux et les trous. Bientôt, Aron rentrera chez lui et Juniper sera seule - et cela fait un an, qu’elle est seule le soir, qu’elle dîne seule, qu’elle lit et s’occupe de Darcy sans avoir d’autre obligation que de préparer sa journée suivante. C’est étrange. Juniper se tient là, dans la cuisine, à observer Aron - Aron qui s’agite sans s’agiter, qui fonctionne sur un mode différent du sien, qui semble si concentré qu’elle se demande, un instant, s’il l’a entendue. Mais elle sait qu’il écoute : il choisit simplement de ne pas parler quand il n’a rien à dire, et c’est une qualité que Juniper admire.

 « T’es bien plus mignon que Colin Firth. » La libraire ne peut s’empêcher de rire tandis que Darcy se met à ronronner plus fort, ravi de l’attention que lui donne l’étranger - il n’appartient à la maison, mais le chat se souvient de lui, sait qu’il ne s’agit pas tout à fait d’un inconnu. La boule de poil roule son dos et se frotte contre la jambe de l’homme qui travaille, observant les doigts avec l’envie furieuse de jouer avec les fils. Il n’en fait rien pourtant, assis là, attendant qu’on lui donne un peu plus d’attention.  « Si tu commences à le complimenter, il ne va plus te lâcher. J’ai jamais vu un chat aussi orgueilleux. » La bestiole, sachant que l’on parle d’elle, miaule d’un air outré avant de donner un gentil coup de tête à la cuisse d’Aron.

« C’est ici que je me sens le mieux. » Juniper hoche la tête, bien qu’il ne puisse pas la voir. Elle comprend. Vraiment, elle comprend. Il faudrait entrer dans les détails pour marquer son acquiescement, livre d’autres choses, mais Aron ne demande rien, Aron ne demande jamais rien - et elle lui en est reconnaissante. « Away is good but home is best, comme on dit par ici. » Elle n’a pas bien compris le suédois, mais elle en admirer la sonorité et se rend compte qu’elle n’a pas souvent entendu Aron le parler. Les gens qui la connaissent, en tant qu’amie, voisine ou libraire s’adressent à elle en anglais, généralement, et son suédois ne progresse que lentement. C’est une drôle de langue, bien loin de son américain roulant et chaud, mais c’est une langue qui plaît à son oreille.  « L’idée me plaît… Même si elle est à l’opposée de mon chemin, je crois. Il n’y a pas un proverbe sur les américains qui viennent s’installer à Visby? » Un sourire lui échappe : Aron et elle se ressemblent sur bien des points, sur l’amour qu’ils portent à leurs maisons, sur le soin qu’ils prennent à les restaurer et à les rendre uniques, personnelles, mais Juniper est parti et toute son histoire restera marquée par ce départ. Par ce qu’elle a laissé derrière elle, par ce qui l’attend encore à San Francisco, par sa famille qui se demande si oui ou non, elle va se décider à revenir. Ils devraient comprendre, pour tant : c’est sa famille qui lui a donné le goût de la liberté.

L’eau se met à bouillir et Juniper en verse dans sa tasse avant d’y ajouter le thé.  « Tu es très modeste, j’entends parler les clients, et le Black Sheep a l’air toujours bondé ! Tout le monde a l’air d’aimer votre pub. » Elle aussi l’apprécie, bien qu’elle n’y passe pas souvent. Quand s’y est-elle arrêtée pour la dernière fois ? C’était il y a déjà un moment, un soir où Leif avait tenté de la convaincre de boire une bière sans jamais y parvenir - c’était il y a un moment, oui, il y a plusieurs semaines déjà.  « Qu’est-ce que je te sers ? J’ai aussi une bonne bouteille de whisky, si tu es amateur. Mon frère me l’a envoyé de la maison. » Bien qu’elle ne boive pas d’alcool, River a tendance à inclure dans ses colis un tas de souvenirs de leur adolescence, dont cette bouteille de whisky au tiers entamée qu’ils ont tenté de boire, un jour, sans jamais y parvenir. En voyant l’air d’Aron, elle oublie toutefois River et se met à rire, imaginant Gala en train d’aménager le bar à sa manière.  « Tu as l’air ravi, à ce que je vois. Il va falloir que je redouble de coussins et de plaids pour vous faire concurrence, c’est ça ? »
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Aron Strömquist
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyDim 17 Fév - 19:40

Son proverbe suédois semble toucher Juniper, qui lui fait toutefois remarquer que leurs trajectoires de vie sont bien différentes. Aron réalise soudain qu’il a peut-être manqué de tact : il sait finalement bien peu de chose sur sa voisine, si ce n’est qu’elle est Américaine ; qu’elle a ouvert une librairie anglophone quelques temps après son arrivée à Visby ; qu’elle est débrouillarde et bricoleuse ; qu’elle aime le thé. Jamais il ne l’a questionné sur sa vie d’avant, sur les raisons qui l’ont poussé à se déraciner pour venir s’installer sur ce petit morceau de terre de l’autre côté du globe, à Gotland. N’aimant pas particulièrement parler de lui, Aron questionnait assez rarement les gens qu’ils croisaient — de l’inconnu accoudé à son bar à ses proches — sur eux. Certains pensaient que c’était par manque de curiosité, d’autre mettaient ça sur le compte de sa supposée misanthropie. En réalité, Aron craignait plus que tout de se montrer intrusif, pressant : ils acceptaient les confidences comme des marques précieuses de confiance ; et la confiance, ça se mérite.

Il s’apprête à demander à Juniper d’où elle vient, exactement, mais son hésitation joue contre lui et la jeune femme passe déjà au sujet suivant. « Tu es très modeste, j’entends parler les clients, et le Black Sheep a l’air toujours bondé ! » La remarque lui décroche un sourire. Sa nature austère et un peu bourru lui faisait tout voir avec une once de pessimiste. C’était lui qui s’inquiétait constamment de la comptabilité. Qui réglait les chamailleries de voisinages avec les autres commerçants ou les habitants de la rue. Qui escortait les badauds alcoolisés sur le trottoir. Aron avait souvent l’impression de porter ce bar à bout de bras, et se demandait régulièrement à quoi tout ça rimait. Et puis Gala débarquait avec une idée lumineuse qu’il s’obligeait à accueillir avec tiédeur — il fallait bien qu’un des deux au moins garde les pieds sur terre ; des habitués se mettaient à chanter en coeur des chansons paillarde ; des touristes le remerciait pour ses recommandations de visite. Ces petits détails qui lui laissaient croire, le temps de quelques minutes, qu’il avait réussit à accomplir quelque chose, quand même, avec le Black Sheep. Parfois, même, il s’autorisait à ressentir de la fierté pour cette petite centaine de mètres carrés, cette équipe hétéroclite et cette devanture noire aux lettres dorées. « Tout le monde a l’air d’aimer votre pub. » Il se tourne finalement vers Juniper pour pouvoir croiser son regard et lui lance : « Faudrait que je te présente à nos voisins, ils en ont une toute autre opinion! », visiblement incapable d’accepter un simple compliment.

Aron refixe enfin le cache-prise contre le mur et se redresse en étirant son cou et ses épaules, endoloris après être resté arc-bouté si longtemps. Il faudrait sans doute redémarrer le courant pour vérifier que l’installation fonctionne, mais il se garde bien de le faire remarquer à son hôte. La cuisine est plongée dans une lumière crépusculaire troublante, comme hors du temps. Il s’approche lentement de Juniper, qui se tourne vers lui, une bouteille entamée à la main. « Qu’est-ce que je te sers ? J’ai aussi une bonne bouteille de whisky, si tu es amateur. Mon frère me l’a envoyé de la maison. » Il observe le liquide mordoré absorber les quelques rayons de lumière restants, tout en relevant les quelques informations que Juniper lui révèle sur elle. Il a du mal à l’imaginer aux Etats-Unis, avec ce frère, sur le porche de sa maison familiale du Midwest — ou peut-être de la côte ouest? Juniper est le genre de personne qui pourrait venir de la côte ouest. Il se met soudain à imaginer sa famille, son imagination nourri du cinéma hollywoodien et autres séries américaines qu’il regarde occasionnellement. Avait-elle fréquenté une prestigieuse université de l’Ivy League? Avait-elle passé son adolescence à arpenter d’immense malls de banlieue avec ses amis? Roulait-elle en énorme SUV, là-bas? Ses parents avaient-ils voté pour Trump? Un verre de whiskey semblait bienvenu. « Avec plaisir, merci. » La libraire lui verse un peu d’alcool dans un verre, puis lui tend.

« Tu as l’air ravi, à ce que je vois. Il va falloir que je redouble de coussins et de plaids pour vous faire concurrence, c’est ça ? » Alors qu’il porte le verre à ses lèvres, il sourit une nouvelle fois. Il interrompt son geste et répond, esquivant une nouvelle fois la possibilité de se livrer : « Visiblement t’as pas à t’en faire, les affaires ont l’air bonnes de ton côté aussi, d’après ce qu’on m’a dit. » Il lève son verre vers la jeune femme, Juniper l’imite, et il poursuit, d’un air exagérément solennel : « Longue vie aux commerces de centre-ville! » La porcelaine et le verre s’entrechoquent et Aron englouti une première gorgée de whisky. Le liquide réchauffe sa gorge et semble peu à peu délier sa langue. Peut-être est-ce la pénombre qui les enveloppe, leur soudaine promiscuité ou simplement la douceur de cette fin d’après-midi d’hiver, mais l’homme baisse finalement sa garde. « C’est pas toujours facile, comme boulot, mais j’ai la chance de bosser avec ma soeur. Elle me rend complètement dingue 99% du temps, mais on est heureux de pouvoir faire honneur à notre héritage familial, à notre façon. » La jeune femme l’interroge du regard, et il réalise que contrairement à la majorité de la population à Visby, Juniper ne connaît pas la famille Strömquist. Il s’empresse d’ajouter : « Mes grands-parents étaient propriétaires du local, jusqu’à la fin des années 90. C’était un tout petit resto : ma grand-mère était en cuisine, mon grand-père pêchait le poisson, ma mère donnait un coup de main en salle lorsqu’elle passait en ville… » Il s’interrompt pour boire une nouvelle gorgée d’alcool, croise furtivement le regard de l’Américaine, qui l’écoute avec attention. « …et puis avec la hausse des prix du centre-ville et les problèmes d’argent, ils ont été obligés de vendre. Ca a pas été simple. C’est devenu un restaurant italien franchisé. Leurs pizzas étaient dégelasses. » Il grimace, se remémorant cette période compliquée de l’histoire familiale, alors qu’il était encore ado. Réalisant soudain qu’il venait de s’ouvrir comme il ne le fait que très rarement, il s’empresse de conclure : « Bref, le truc a fermé il y a 3 ans, Gala venait de rentrer à Visby : on a rassemblé nos économies et on a racheté le local ensemble. »

Juniper le regarde avec curiosité ; peut-être est-elle aussi surprise qu’Aron lui-même de cet élan soudain. Une nouvelle intimité se dessine entre eux, séparés de quelques dizaines de centimètres seulement, dans cette petite cuisine sombre. Il observe les ombres danser sur le visage de Juniper alors qu’elle joue avec la ficelle de son sachet de thé. L’instant est agréable, ne nécessite rien de plus, rien de moins. Conscient de la fragilité du lagom, Aron fini tout de même par dire, doucement : « Je ne savais pas que tu avais un frère. » il désigne la bouteille de whisky du menton. « Je ne t’ai même jamais demandé d’où tu venais ou ce qui t’avait amené ici… So what’s your story, Miss Andersen? » lance-t-il, son ton espiègle teinté d'un véritable intérêt.
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Juniper Anderson
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyMar 19 Fév - 21:15


Juniper met de côté le proverbe, le garde dans un coin de sa tête. Le silence ricoche sur le silence et elle ne se vexe pas - pourquoi le ferait-elle ? La phrase est belle et elle le sait : Aron et elle ont une trajectoire différentes, mais cela n’est pas un problème, pas pour elle. Il a décidé de rester, d’accepter Visby, l’a pris à bras le corps et l’a accepté sans y regarder à deux fois. Du moins est-ce ce qu’elle pense : peut-être a-t-il eu envie de partir, parfois, avant de décider de rester, peut-être qu’il existe des choses qu’il n’aime pas, sur cette île, dans cette ville. Juniper ne sait pas vraiment. Elle n’en sait pas plus Aron qu’Aron à son sujet et c’est en parlant, comme ça, dans une semi-obscurité, qu’elle s’en rend compte. Ils ne se connaissent pas vraiment et c’est presque étrange d’échanger comme ça. Quand d’habitude ils bricolent, le silence se pose sur eux naturellement - et c’est généralement Juniper qui le brise pour proposer un café, un sandwich, pour parler du quotidien, pour simplement dire quelque chose qu’elle vient de penser. Le silence ne la gêne pas - ne la gêne plus, depuis qu’elle habite à Visby - mais elle reste Juniper, les pensées vives, la discussion facile, même avec Aron, le fameux ours de la ville.

« Faudrait que je te présente à nos voisins, ils en ont une toute autre opinion! » Laissant échapper un éclat de rire, debout près du comptoir, la libraire secoue la tête et soupire, faussement exaspérée.  « T’es pas possible, quand même. » Elle ne va pas plus loin, ne le charrie pas plus, pas pour le moment. Elle sait qu’il y a le lagom, derrière tout ça, cet équilibre qu’elle a du mal à acquérir, à préserver, le ni trop, ni pas assez. En observant Aron travaillé, elle comprend que c’est ça, qui le caractérise. Il n’est ni misanthrope ni véritablement ours, juste ni trop, ni pas assez. Et c’est en le regardant que Juniper comprend qu’elle ne sera jamais vraiment comme ça, qu’elle détonnera toujours, même un peu, car elle n’a pas grandi ici et que cet équilibre n’est inscrit ni dans son éducation, ni dans sa personnalité. Elle n’a pas pour autant le mal du pays et préfère se tenir là, dans le noir, que dans le grand soleil de Californie. Dans la foulée, elle pense qu’il faudrait rallumer la lumière, tester leur installation, mais Juniper ne bouge pas, pas pour l’instant. Aron se redresse, se déplie et elle l’observe. Il lui faut un instant pour attraper le verre et le servir, et elle y va généreusement. Elle lui doit au moins ça, peut-être même une tarte, un gâteau ou un dîner, quelque chose pour le remercier de tous les coups de main qu’il a pu lui donner.

« Visiblement t’as pas à t’en faire, les affaires ont l’air bonnes de ton côté aussi, d’après ce qu’on m’a dit. Longue vie aux commerces de centre-ville ! » Juniper laisse échapper un sourire et lève sa tasse, laissant verre et porcelaine s’entrechoquer dans le silence.  « Ça se passe plutôt bien, c’est vrai. Pour le moment je n’ai pas à m’en faire. J’espère que ça durera. Même si je ne suis pas sûre que les livres se vendent aussi bien que la bière… » Il ne manquerait que le clin d’oeil pour accompagner l’air malicieux qu’elle lui adresse, mais Juniper se contente de laisser faire et de s’appuyer contre le comptoir, peu pressée de rallumer la lumière ou de poursuivre le reste de sa journée, ou de sa soirée, faudrait-il dire. Et puis Aron se met à parler. Elle ne saurait dire ce qui l’y pousse, mais elle se tait, le laisse expliquer, raconter l’histoire du Black Sheep avant qu’il ne soit le pub qu’il est aujourd’hui. Une histoire de famille qui fait chaud au coeur, qui force, quelque part, à une émotion précise. « Bref, le truc a fermé il y a 3 ans, Gala venait de rentrer à Visby : on a rassemblé nos économies et on a racheté le local ensemble. » Il conclut un peu vite, comme gêné de s’être soudainement épanché et Juniper en profite pour rebondir.  « Je vous admire. Je trouve ça important, de garder ce genre d’endroit en vie. C’est important les vraies histoires, comme ça… » Et peut-être que ça lui manque, cette sorte de continuité, sans qu’elle n’ose le dire. Peut-être que c’est ce qu’elle cherche, ce qu’elle aurait aimé, ce qui l’a attiré à Visby. La question la laisse pensive, un instant, et elle revoit, dans sa tête, Gala qui s’affaire au bar, Aron qui essuie les verres, solide, stable, observant les clients avec habitude et attention.

 « J’aurais bien aimé voir l’endroit, à l’époque. Le restaurant de tes grands-parents, je veux dire. » L’idée la traverse comme ça et elle la formule en imaginant leurs visages, la décoration de l’époque, la clientèle, également. Elle peut tout à fait voir les plus anciens habitants de Visby assis dans la petite salle, discutant, patientant sagement, le dimanche, que leur plat arrive. « Je ne savais pas que tu avais un frère. » La remarque la ramène à l’obscurité de la cuisine qui va grandissant et, d’un geste qui détourne l’attention, volontairement ou non, elle tend la main, attrape le briquet le plus proche et allume la bougie qu’elle laisse sur le comptoir de la cuisine. La lueur éclaire un sourire tendre, bien qu’un peu triste sans qu’elle ne puisse vraiment l’éviter. What’s your story, morning glory ? La chanson résonne dans sa tête et c’est l’anglais qui prend le pas sur le suédois.  « His name’s River, he’s my younger brother. He’s kind of a dreamer, too. » Déposant sa tasse un bref instant, elle se dirige vers le réfrigérateur que la flamme de la bougie n’éclaire qu’à peine et y prend une photo qu’elle tend à Aron. « J’ai deux autres soeurs mais elles sont plus vieilles et on n’a jamais été très proches. River et moi, on a grandi ensemble. C’était un peu particulier, chez nous : mes parents se sont installés dans une communauté autonome, dans le Colorado, quand ils avaient la vingtaine. Ils venaient de se marier. Il faut imaginer ça comme une grande ferme : on avait un grand potager commun, des animaux, chaque famille une grande maison… On allait à la ville et tout ça, mais pas très souvent. » June reprend sa tasse, en boit une gorgée, repense aux vaches et aux chevaux, aux tomates qui poussaient dans le jardin, puis elle revient, regarde Aron dont les traits réguliers semblent se mouvoir au rythme de la bougie.  « J’ai vécu à San Francisco plus tard, mais j’ai toujours eu du mal à m’adapter à la ville, je crois. »
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyDim 3 Mar - 11:56

A cette heure-ci, le dernier rayon de soleil est allé finir sa course derrière la cime des arbres. La faible clarté du ciel inonde encore la petite cuisine de Juniper d’un atmosphère claire-obscure mais rapidement, on ne distingue plus les contrastes des visages, les détails des cadres aux murs et des étiquettes sur les bocaux. Aucun des deux ne semble vouloir se résigner à relancer le courant. Lorsque la jeune femme allume enfin une bougie, Aron ressent une sorte de soulagement — ou est-ce de la satisfaction? — de voir qu’elle non plus ne souhaite pas faire éclater leur petite bulle. La minuscule flamme vacille et l’homme se surprend à observer le vert des yeux de son hôte, devenus mordorés à la lueur de la bougie.

Entre deux gorgées de thé chaud, et après avoir écouté son histoire balbutiante, elle lance d’une voix évaporée : « C’est important les vraies histoires, comme ça… » Le regard de Juniper devient lointain. Il cherche sur son visage des indices, lorsqu’elle s’enquiert de savoir à quoi ressemblait le petit restaurant des Strömquist. Il sent quelque chose de fébrile et fragile résonner en elle. S’il avait été du genre spontané, il aurait sans doute posé sa main avec tendresse sur sa joue, caressé son menton avec douceur, peut-être même qu’il l’aurait attiré vers lui et… Troublé par ses pensées, Aron englouti avec hâte une nouvelle gorgée de whiskey. Il suit son regard qui est allé se perdre au-delà des fenêtres de la cabane. Une mine couche de givre commence déjà à se reformer contre les croisillons des vitres. Sans réfléchir d’avantage, il se râcle la gorge comme pour essayer de se débarrasser de sa pudeur et répond : « La salle était minuscule, ça sentait toujours le poisson grillé… les meubles étaient tous dépareillés… y avait du carrelage bleu partout et la tapisserie était vraiment atroce… c’était les années 80, quoi. » Un sourire discret lui barre le visage et sa gorge se serre un peu alors qu’il se remémore ces souvenirs d’enfance : le bruit de la friture dans les poêles, la vision de sa petite soeur faisant la discussion aux habitués à table, l’odeur de l’aneth qui attendait sagement son saumon dans la cuisine… « Gala a accepté de garder la tapisserie dans le bureau. » qu’il ajoute, un peu bourru, un rire dans la voix. Son attention se porte à nouveau sur Juniper : il ne sait pas bien si ses récits la mettent en joie ou la rendent triste. Il ajoute, redoutant d’être maladroit : « Je te montrerai des photos, si tu veux. »

L’Américaine et le Suédois restent postés là, en silence, les mains occupées autour de leurs verres, sans jamais vraiment se regarder mais pas prêts à prendre leurs distances. Le temps se suspend quelques secondes, puis Juniper fait quelques pas jusqu’à son frigo, duquel elle décroche une photo. Un portrait pris à bout de bras, un peu surexposé, dévoile le visage de Juniper et d’un jeune homme partageant le même sourire et le même regard espiègle. La photo devait avoir quelques années. Alors qu’il détaille l’image — en prenant soin de ne pas avoir l’air de trop détailler la photo, il écoute Juniper raconter son enfance dans le Colorado, qui est bien loin de ce à quoi il s’attendait. Le paysage commence à se pendre autour de la jeune femme : un soleil rasant, les Rocheuses partout où le regard se pose, les sapins. Aron n’avait jamais mis un pied dans l’état du Colorado — ni même aux Etats-Unis — mais son goût pour le cinéma Américain et l’efficience du système éducatif suédois lui avaient permis de s’en faire une image plutôt précise. Juniper raconte ensuite la ferme, le potager, les animaux. Il ne peut s’empêcher d’imaginer les couronnes de fleurs, les santiags usées, les jupes longues et vaporeuses cernées de boue, les cheveux dorés au vent. Tout cela semblait bien exotique, comparé à son enfance dans une petite ville de pêcheurs suédoise. Le récit est raconté avec tendresse, mais il sent que Juniper ne dit pas tout. Il ne peut pas lui en vouloir : pour la majorité, nous choisissons de ne garder que les bons souvenirs, ceux qui rendent la vie un peu plus supportable. « J’ai vécu à San Francisco plus tard, mais j’ai toujours eu du mal à m’adapter à la ville, je crois. », elle conclut. Des images du Golden Gate Bridge et de Lombard Street s’imposent à lui, lui faisant prendre conscience de l’asymétrie de leurs situations. Le soft power Américain lui avait permis, à lui, un suédois ayant peu voyagé, de se représenter avec une relative fidélité la vie de Juniper. Elle, en revanche, n’avait probablement aucune idée d’à quoi pouvait ressembler une ville comme Visby dans les années 80. Il devait bien admettre qu’ils avaient au moins en commun leur désamour pour la ville — dans le cas d’Aron, il s’agissait même probablement plus d’hostilité. Ses rares excursions à Stockholm (toujours forcées), lui donnaient l’impression d’être un éléphant dans un magasin de porcelaine : il n’avait jamais le bon rythme, pas les bons réflexes, pas les bons mouvements, par la bonne allure, pas les bons mots.

Pas du genre à poser mille questions, Aron est tout de même curieux d’en savoir plus sur cette vie bohème. Il tente, persuadé de passer pour un ignorant : « C’était une sorte de communauté… amish-hippie, c’est ça ? » La question provoque un haussement de sourire amusé chez Juniper. Il ajoute avec un sourire narquois, derrière son verre : « Ca expliquerait les prénoms. »  
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Juniper Anderson
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptySam 9 Mar - 21:25

Le calme s’est posé sur la pièce, sur Aron et Juniper - elle se contente d’écouter, pendant un moment, d’imaginer le pub en un autre endroit, un restaurant traditionnel, tenu par un couple un peu vieillissant, la mère d’Aron venant, quand elle le peut, donner un coup de main et Aron lui-même, bien plus petit, les sourcils tout de même un peu froncés, zigzaguant entre les tables avant de s’enfuir pour aller jouer ou explorer, partir à l’aventure sur l’île. Il n’y a que Gala qui lui échappe : Juniper la connaît mal, n’a jamais vraiment eu l’occasion de lui parler pour de bon. Elle se demande même si c’est une impression qu’elle a, ou si Gala ne l’aime pas, sans qu’elle ne sache vraiment pourquoi. L’idée lui échappe : ce n’est pas le moment d’y penser ni de se faire du souci. L’atmosphère est douce, malgré ce drôle de sentiment qui lui triture les entrailles - une sorte d’envie, peut-être, des restes de culpabilité, elle ne saurait dire. « La salle était minuscule, ça sentait toujours le poisson grillé… les meubles étaient tous dépareillés… y avait du carrelage bleu partout et la tapisserie était vraiment atroce… c’était les années 80, quoi. » Un rire lui échappe, se souvenant parfaitement de ce à quoi ressemblait les années 80 chez elle aussi.  « J’ai toujours bien aimé les années 80, mais certainement pas pour la décoration d’intérieur… On avait de drôles de tentures chez nous aussi. » Juniper l’écoute parler de Gala avec une sorte de tendresse fraternelle et esquisse un sourire. Il y a une certaine pudeur chez les suédois, encore plus grande peut-être chez Aron, mais elle peut deviner le lien qui les lie.

« Je te montrerai des photos, si tu veux. » Il termine un peu vite son histoire, comme s’il était gêné d’avoir parlé de lui, de sa famille. Ce n’est pas la première fois que Juniper se rend compte de ce qu’ils ne disent pas, quand ils sont ensemble, de ce dont ils ne parlent jamais - sauf ce jour-là. Elle se demande si c’est la lumière, ou simplement l’atmosphère de la fin de journée qui pousse à la confidence.  « Ça serait avec plaisir. J’aimerais bien mettre une image sur l’idée que je viens de me faire du restaurant. » Car les années 80, en Suède, étaient certainement bien différentes de ce qu’elle a pu connaître et qu’elle est curieuse, aussi. Curieuse, et qu’elle aime les histoires comme ça - et la façon dont Aron les raconte.

Le silence leur tombe dessus, une nouvelle fois, personne ne bouge. Ses yeux volètent, vont de la vitre jusqu’à sa tasse avant de monter jusqu’à Aron. À la dérobée, elle observe un instant son visage que certains disent fermés - une erreur. Il n’est pas dur, non plus, juste taillé avec précision. Les clichés véhiculés jusque chez elle l’avaient préparées à une armée d’hommes et de femmes blonds, le cheveu brillant au soleil, le teint clair et les yeux plus bleus que le ciel ou la mer un jour d’été. L’image la ramène à River, tout comme la conversation, et Juniper lui tend la photographie qu’ils ont pris, quelques étés plus tôt, alors qu’ils passaient tous deux quelques jours au ranch - ou du moins est-ce comme cela qu’ils avaient pris l’habitude d’appeler la maison familiale. Aron ne dit rien : elle a l’impression de voir quelques choses passer dans son regard, une idée, peut-être, une pensée quelconque qu’elle ne peut identifier. « C’était une sorte de communauté… amish-hippie, c’est ça ? Ça expliquerait les prénoms. » Elle hausse les sourcils alors qu’Aron se cache derrière son verre, lui prend la photo des doigts et lui assène un coup bien senti sur l’avant-bras - aussi brutal que peut l’être un pauvre bout de papier glacé.  « Nos parents étaient… Très proches de la nature, plus hippie et new âge qu’amish. Ne te fiche pas de moi. » Son sourire, à l’inverse de ses mots, l’y autorise clairement : elle est habituée à porter un nom d’arbre et n’y fait plus vraiment attention tant cela lui paraît normal.  « Ma fille s’appelle Rose. » L’information lui échappe subitement et, pendant un instant, elle semble elle-même étonnée d’avoir parlé, comme si quelque chose venait de lâcher ; comme si elle avait retenu l’information trop longtemps.  « À croire que j’ai perpétué la tradition familiale… Je n’y avais jamais vraiment fait attention avant, maintenant que j’y pense. » Elle ne peut s’empêcher d’observer la réaction d’Aron. Peut-être a-t-elle un peu peur de ce qu’il va dire, ou de ce qu’il va penser - elle n’avait pas prévu de parler de Rose, ni de Jasper, ni de quoi que ce soit de sa vie d’avant.
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Aron Strömquist
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyDim 10 Mar - 19:07

« Ne te fiche pas de moi. » Le ton faussement vexé de la jeune femme agrémenté à son accent américain amusait Aron. Ces gentilles moqueries créaient une nouvelle forme d’intimité entre eux, qui était tout sauf désagréable. C’était, à vrai dire, la seule façon qu’il connaissait pour signifier aux les gens qu’il appréciait qu’il tenait à eux. A part peut-être avec ses grands-parents, avec qui ils ne se permettait pas tous les écarts, ou avec son père, qu’il connaissait trop peu pour ça, « qui aime bien châtie bien » était son mode opératoire. Avec sa soeur, sa mère, ses amis… et la gent féminine. Il se transformait en général en adolescent badin, bien incapable d’avoir une conversation à coeur ouvert sur ses sentiments ou à flirter frontalement — c’était d’Aron Strömquist, dont on parlait : l’homme qui avait vu ses quelques histoires d’amour partir en fumée parce qu’il ne savait pas dire ou faire ce qu’il fallait, quand il le fallait.

Alors que son attention est captée par le sourire un peu retenu de Juniper, celle-ci lâche soudain : « Ma fille s’appelle Rose. » L’annonce lui fait l’effet d’une petite décharge électrique, à peine moins violente que celle qu’il a expérimenté une heure plus tôt, dans cette même cuisine. Il ne sait pas pourquoi cette information le plonge dans un tel état de surprise. Juniper et Aron n’avaient jamais beaucoup échangé sur leurs vies respectives, jusqu’à présent, il était normal qu’il en sache si peu. Pourtant, l’idée que Juniper puisse avoir un enfant ne lui avait jamais traversé l’esprit ; elle n’avait en tout cas jamais laissé d’indice en sa présence — il s’en serait souvenu. « Ah? » il lâche simplement, incapable de formuler une vraie question et cachant son léger malaise derrière une nouvelle gorgée de whiskey. Le verre était presque vide, un détail qui créait soudain chez lui une anxiété nouvelle. « À croire que j’ai perpétué la tradition familiale… Je n’y avais jamais vraiment fait attention avant, maintenant que j’y pense. », elle continue. Il sent son regard sur elle, mais il reste silencieux, se disant que peut-être, elle comblerait spontanément les trous qui sont en train de se former dans son esprit. Une multitude d’interrogations lui passent par la tête alors qu’il tente de garder une expression neutre : quelle âge Rose a-t-elle? ou vit-elle? est-ce qu’elle a les mêmes yeux verts que sa mère? est-ce que, peut-être, il lui est arrivé quelque chose, si elle n’est pas aux côtés de sa mère? Cette dernière question lui apparait subitement idiote : sa propre mère vit au quatre coins du monde depuis qu’il est tout petit, et ça n’a jamais été sujet à discussion. L’interrogation est rapidement remplacée par une autre, qu’il essayait pourtant d’écarter de son esprit, conscient que ça ne le regardait aucunement : est-ce que Juniper était toujours en relation avec le père?

Un silence d’une autre saveur s’installe à nouveau entre eux. A ce stade, il faisait quasiment nuit dehors. Aron fait mine de regarder par la fenêtre, conscient d’être observé. Son attention se reporte sur sa boisson dans ses mains, alors qu’il fait tourner la petite larme d’alcool au fond du verre. Il devenait évident que Juniper attendait une réaction de sa part alors il lâcha enfin, d’une voix égale, avec un détachement feint : « Je ne savais pas que tu avais une fille. »
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Juniper Anderson
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Réputation : La nouvelle venue, plus si nouvelle que ça, qui s'est décidée à reprendre la librairie sur le point de fermer. L'américaine qui semble sourire presque tout le temps et dont on ne sait pas grand chose, à vrai dire, si ce n'est qu'elle vit retirée sur l'île, qu'elle n'a pas de famille, qu'elle aime le thé, les biscuits, et bien sûr les livres.

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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyDim 10 Mar - 20:27

 « Ah ? » C’est tout ce qui lui échappe, pour le moment. Juniper se rend compte qu’elle n’aurait certainement rien dû dire : elle n’en a pas encore parlé, autour d’elle, a gardé l’information si secrète, si bien enterrée, que personne n’a jusque là soupçonné l’existence de Rose et de Jasper. Puis il y a autre chose qui la dérange, quelque chose qu’elle n’ose pas tout de suite s’avouer : elle a un peu peur. C’est difficile à admettre, difficile à penser, même, que la réaction d’Aron est importante, qu’elle craint de le faire fuir, peut-être, avec cette révélation. C’est étrange, vraiment, de voir comme ça la peine par avance, comme cet air un peu fermé, un peu lointain, cet air qu’elle n’arrive pas à lire la met mal à l’aise. Juniper regrette dès qu’il ouvre la bouffe, regrette l’instant précédent, quand il y avait encore un peu d’alcool dans son verre, quand l’atmosphère était plus légère. Ce n’est pourtant pas si désagréable, d’avoir parlé - elle a l’impression qu’un poids vient de s’envoler, de quitter sa poitrine, un poids qu’elle n’avait pas conscience de porter. Après la peur, c’est la culpabilité qui s’installe : penser à Rose, qui est restée derrière, qu’elle ne peut pas voir sans autorisation, penser à tout ce que cette histoire implique et cache, tout ce qu’elle n’est pas vraiment sûre d’assumer.

 « Je ne savais pas que tu avais une fille. » Une réponse un peu rapide se forme sur ses lèvres, qu’elle entrouvre puis referme avant de finalement dire :  « Je te ressers ? » Délicatement, elle lui prend le verre des mains, se retient d’en finir le fond d’une gorgée un peu désespérée, un peu mal à l’aise, et lui sert une rasade de whisky en laissant le silence se prolonger. Son thé a refroidi et elle dépose la tasse sur le comptoir, une fois le verre rendu, les mains enfin vides - ça aussi, c’est étrange et désagréable, presque déstabilisant. Ses doigts se mettent à jouer avec le bord de son pull, doucement, et Juniper finit par lever à nouveau les yeux vers Aron.  « Je n’en ai pas encore vraiment parlé à qui que ce soit. C’est une histoire un peu compliquée. » L’euphémisme la ferait presque sourire et elle laisse échapper un soupir.  « Enfin, j’imagine qu’elles le sont toutes, quelques part. » Elle ne connaît pas celle d’Aron, se rend compte qu’elle ne connaît pas l’histoire de ses connaissances et de ses amis, à Visby - elle ne sait que ce qu’on veut bien lui dire, ce qu’on accepte de dévoiler, et ce n’est souvent que peu de choses.

 « Elle a eu trois ans il y a peu, mais je ne la vois pas souvent depuis mon divorce. Elle vit avec son père à San Francisco. » Juniper a l’impression de s’enfoncer. Profitant d’un bref silence, elle reprend la photo qu’elle avait posé sur le comptoir sans s’en rendre compte et retourne l’épingler sur le frigo, prenant un instant pour la regarder - de regarder celle de sa fille, plus petite, un peu cachée - avant de revenir, presque sans bruit, là où elle était. Il n’y a plus que la bougie pour les éclairer et la nuit tombe vite, est déjà tombée, même, derrière les vitres. Elle attrape une autre loupiote qui traine, l’allume, puis en allume une autre. Une faible lumière, chaude, jaune orangée, les éclaire sans vraiment les agresser. June voit bien qu’elle tente de faire traîner, d’étirer le moment - peut-être Aron a-t-il envie de partir ? Peut-être devrait-elle le laisser partir ?  « Je suis désolée, je plombe toute la conversation avec mes histoires. Les divorces, ça n’a rien de très réjouissant ni de très original. » Un sourire, léger mais un sourire tout de même, étire finalement ses lèvres.  « Tu me laisserais t'inviter à dîner pour te remercier ? » La proposition dépasse ses pensées mais ça, Juniper ne le regrette pas.
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Aron Strömquist
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyMer 13 Mar - 16:49

Juniper le ressert et il lui en est reconnaissant, silencieusement, lorsqu’il enroule à nouveau ses doigts autour du verre. Leurs mains manquent de se toucher. Dans cette atmosphère feutrée, leurs gestes à tous les deux sont lents et semblent de plus en plus précautionneux à mesure que leur promiscuité augmente. Malgré sa surprise à l’annonce de Juniper, Aron se sent étrangement bien dans cette petite cuisine ; et pourtant, les lieux où ils appréciait réellement et sincèrement passer du temps se comptaient sur les doigts d’une main. La cabane de la jeune femme avait été aménagée avec soin, mais c’était sans aucun doute sa propriétaire qui exerçait sur Aron un drôle de pouvoir.

La nuit était tombée. Il devait être l’heure de s’excuser et laisser la jeune femme à ses occupations ; abuser de l’hospitalité de ses hôtes était probablement une des pires offenses pour un Suédois. Il aurait voulu se mettre en mouvement, mais il s’en sentait soudain incapable. Quelque chose de particulier était en train de bourgeonner entre eux, quelque chose de fragile qu’Aron craignait briser d’une parole mal venue ou d’un geste brusque. Il sentait déjà que sa réaction à la découverte de l’existence de Rose n’avait pas été à la hauteur. Après un nouveau silence, Juniper murmure : « Je n’en ai pas encore vraiment parlé à qui que ce soit. » Aron hoche la tête presque imperceptiblement, espère lui signifier qu’il est reconnaissance de cette preuve de confiance. C’est une histoire un peu compliquée. En silence, il l’écoute raconter son histoire, brièvement. Sa fille est petite — c’est encore quasiment un bébé. Il réalise l’étendue de son ignorance, le vide qui jusque là entourait la jeune Américaine, ce qu’elle avait du traverser (et ce qu’elle traversait en ce moment-même) alors qu’il ne l’avait jamais considéré autrement que comme sa mignonne voisine. Il se sent soudain idiot, presque coupable, et lourdaud. Il ne détache pas son regard de la bouche de Juniper, qui passe du clair à l’obscur à chaque syllabe et à chaque mouvement de tête, à la lueur des bougies. Comme devant la séquence de flashback d’un énième film hollywoodien, il s’imagine Juniper et un homme, dont les traits du visage sont flous, nourrir les mouettes sur la jetée : lui tenant leur enfant, instable sur ses deux petites jambes ; elle prenant une photo de la scène attendrissante. Il chasse l’image de son esprit d’une gorgée de whisky, ne réalisant pas que la sensation désagréable qu’elle lui cause n’est pas nécessairement liée à Juniper.

Doucement, la jeune femme allume des loupiotes supplémentaires. Ce doit être le signal, le moment de partir. Il n’en a pourtant aucune envie. Avec un sourire triste, elle conclue : « Je suis désolée, je plombe toute la conversation avec mes histoires. » Aron fait une moue en signe de protestation, incapable de former une phrase rassurante à l’attention de Juniper. Pourtant, c’est tout ce qu’il aurait aimer faire : lui rappeler qu’ils étaient adultes et qu’il était naturel qu’ils aient des bagages, des histoires. Il n’y avait pas à en rougir. L’espace d’une seconde, il envisage de poser sa main sur la sienne. Entrelacer leurs doigts et lui dire que non, les divorces ça n’avait rien d’original mais que ça n’en restait pas moins douloureux. Qu’est-ce qu’il en savait, d’ailleurs, lui? Il se ravise tout aussi vite, réalisant que le geste aurait probablement été mal venu : elle venait littéralement de lui parler de sa fille et de son ex-mari. Calm down, Strömquist. Juniper interrompt ses pensées à temps : « Tu me laisserais t'inviter à dîner pour te remercier ? » Elle a changé de sujet rapidement, ne lui laissant pas la chance d’avoir une réaction adéquate. Ne lui laissant pas le temps de dire quelque chose de mal assuré, aussi. Il lève les yeux de son verre vers elle. La proposition semble dépasser la politesse, il sent qu’elle est sincère. Ce doit être la deuxième — ou la troisième ? — fois qu’elle la formule, et cet enthousiasme décroche un sourire à l’homme. « Avec plaisir », il répond, retrouvant son avarice pour les mots. Leurs regards se croisent une nouvelle fois, s’attardent, et Aron rompt le contact, un peu troublé. Pour retrouver une contenance, il embrasse la pièce du regard, ajoute un peu précipitamment : « …On sait toujours pas si j’ai fait du bon boulot… tu vas peut-être devoir vivre à la lumière des bougies jusqu’au restant de tes jours. » Il regrette instantanément ses mots : Juniper allait forcément se sentir obligée de rallumer le courant, il serait temps pour Aron de lui souhaiter une bonne soirée et de mettre leurs confidences aux chandelles derrière lui.
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Juniper Anderson
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyVen 15 Mar - 21:13

Aron ne dit rien mais, ces derniers mois, Juniper a appris à s’en accommoder. Les silences de son voisin ne l’ont jamais réellement gênés : elle a pris l’habitude de les combler, parfois, avec quelques histoires, des remarques sur la vie de Visby, des réflexions, parfois. Elle les laisse souvent s’étirer - il est comme ça, Aron, il ne parle pas beaucoup, choisit soigneusement ses mots et écoute ceux des autres. Le silence qui suit ses explications n’est pas gênant et, peut-être, un peu moins lourd que le précédent. La bombe est lâchée, enfin sortie, et Juniper sait qu’il n’en dira rien, que personne d’autre que lui ne saura tant qu’elle ne l’aura pas décidé. Elle sait aussi qu’il ne la juge pas - du moins est-ce qu’elle croit sentir, percevoir, quand il l’observe avec ce regard là. Il y a comme de la compréhension, peut-être, dans les yeux du suédois et, quand il hoche finalement la tête, June se sent quelque part soulagée. Il est parfois difficile de se souvenir que les mots ne veulent pas tout dire, qu’il y a d’autres moyens de montrer, d’exprimer, mais ils ne se connaissent pas encore assez pour qu’elle formule cette pensée à voix haute et, gênée par autre chose que sa propre histoire, la librairie baisse les yeux un instant. Elle se rappelle soudainement la proximité d’Aron - elle n’aura qu’à tendre tout juste le bras pour le toucher, pour effleurer cette main là, bien plus large que la sienne, pour sentir le tissu sous ses doigts. Elle n’en fait rien, bien sûr. Non pas qu’elle n’y pense pas : l’idée lui traverse l’esprit furtivement avant qu’elle ne relève les yeux vers Aron. Il ne lui semblait pas si difficile de se concentrer et de le regarder en même temps, auparavant.

Quelque chose semble le contrarier : sa phrase, peut-être, elle n’en est pas certaine. Ses doigts passent de son t-shirt au paquet d’allumettes qu’elle a déposé sur la table, et ils bougent sans faire de bruit, font tourner la boîte doucement sur le plan de travail. La lumière est à peine plus forte, à peine dérangeante, mais au moins elle peut voir, un peu mieux, ce qui se trame sur le visage de son interlocuteur. Elle ne pensait pas que la journée se terminerait comme ça. Elle n’étais pas non plus certaine qu’Aron accepte son invitation et Juniper se retient, sur l’instant, de lui propose de rester. Elle n’a rien à manger de particulier, n’a rien préparé, mais a presque envie d’improviser, de lui dire de s’asseoir un moment, de profiter du début soirée avec Darcy, et peut-être un verre de vin à la place du whisky, et elle se laisserait peut-être tentée elle aussi.  « Je vais organiser ça alors. » Ce n’est pas l’envie qui lui manque de lui proposer le lendemain soir, ou le sur-lendemain - l’envie de renouveler cette étrange conversation entrecoupée de longs silences et de révélations qui surgissent inopinément. « …On sait toujours pas si j’ai fait du bon boulot… tu vas peut-être devoir vivre à la lumière des bougies jusqu’au restant de tes jours. » Un rire lui échappe : elle doit tester le courant, elle le sait, mais Juniper se contente d’hausser les épaules.  « Ça ne me gênerait pas tellement : je trouve que la lumière des bougies est plus agréable. Mais ça serait un peu compliqué pour lire, je crois. »

Elle accroche à nouveau son regard, volontairement - pour voir, peut-être, ce qui se trouve derrière - avant de s’éloigner. Elle est bien obligée, non ? Aron a une vie, lui aussi, une vie qui n’inclut pas les travaux surprises chez la voisine expatriée et les chats curieux qui tentent de jouer avec les fils dénudés. Juniper s’approche de l’interrupteur, y pose le doigt avec un sourire en coin.  « Moment de vérité. Ta réputation de bricoleur est en jeu, Strömquist. » Avant même qu’elle n’abaisse le bout de plastique, June sait que ça va marcher, et la lumière, bientôt, envahit la pièce. Il y a un temps - un temps mort, un temps de flottement, un regret, peut-être.  « Ça sera donc un dîner amplement mérité. » La lumière est un peu trop crue, à son goût, trop vive après les minutes passées dans la semi-obscurité intime procurée par les bougies. Il lui suffit d’un instant pour éteindre la lumière à nouveau alors qu’Aron finit par la rejoindre, ses outils à la main.  « Je crois que ça va être une soirée bougies. On s’habitue vite. » C’est un départ naturel, presque obligatoire, s’ils devaient tous deux se montrer polis, mais c’est à contre-coeur que Juniper ouvre la porte. L’air froid s’engouffre dans le salon et quelque chose ne lui convient pas. Elle ne réfléchit pas vraiment avant de passer ses bras autour d’Aron, en une étreinte bien de chez elle, un hug qui dit à la fois tout est rien, mais qui n’en est pas moins sincère et spontané. Plus tard dans la soirée, elle en sera peut-être légèrement gênée - mais plus tard seulement.  « Merci, Aron. »
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MessageSujet: Re: (aron) bolt, hammer and screwdriver    (aron) bolt, hammer and screwdriver  EmptyDim 17 Mar - 17:40

Comme il l’avait redouté, la jeune femme s’écarte pour prendre la direction de l’entrée de la cuisine. « Moment de vérité. Ta réputation de bricoleur est en jeu, Strömquist. » D’un air de défi, il croise les bras sur son torse, un sourire en coin. Dans une poignée de millisecondes, la lumière va réapparaitre, ça n’en fait aucun doute. Il le sait, parce qu’en réalité, les déboires électriques de sa voisine étaient minimes, insignifiants. Il lui avait fallu environ une minute pour comprendre où se situait le faux contact ; une de plus pour régler le problème ; une vingtaine de minutes supplémentaires avant que Juniper ne commence à se douter qu’il triturait des fils dans son mur sans autre objectif que celui de faire durer son intervention.

D’un coup, une lumière jaune rempli la petite pièce et force Aron à plisser les yeux. La lumière crue a fait éclater leur petite bulle et rapidement, il passe ses mains sur son visage, comme s’il se réveillait après une longue nuit. « Ça sera donc un dîner amplement mérité » conclue Juniper, qui semble elle aussi incommodée par cette soudaine clarté puisqu’elle ne tarde pas à abaisser à nouveau l’interrupteur. Aron fait mine de s’essuyer le front et lance avec sarcasme : « Ouf, l’honneur est sauf. » La pièce est à nouveau plongée dans l’obscurité, mais l’ambiance n’est plus vraiment la même. L’homme rassemble les quelques affaires qu’il avait emmené avec lui et, en quelques pas, rejoint son hôte dans l’entrée. L’homme empoigne son blouson pendant que Juniper ouvre la petite porte d’entrée en bois. Le froid de cette fin d’hiver vient lui mordre le visage, et alors qu’il réfléchit à la meilleure manière de prendre congé de son hôte, celle-ci s’approche de lui. Avant de réaliser ce qu’il se passe, il sent ses bras frôler prudemment son torse pour venir poser ses mains dans son dos, obligeant la jeune femme à se hisser sur ses pointes de pieds. Le geste est exécuté avec l’assurance de l’habitude ; l’Américaine maîtrise l’art du hug depuis son enfance, c’est évident. Aron l’accueille d’abord avec surprise — les Suédois ne sont pas particulièrement tactile, il fallait le reconnaître. Le visage de la petite librairie s’approche de son torse et dit d’une voix douce : « Merci, Aron. » Les cheveux de Juniper, à quelques centimètres de son visage, sentent un mélange de feu de bois, de cannelle et de vanille. Alors que les muscles de son corps se détendent un à un, l’étreinte furtive prend déjà fin. Leurs regards se croisent puis s’évitent, Aron enfile son blouson, passe une main un peu nerveuse dans ses cheveux et répond enfin, sur le seuil de la porte, loquace comme à son habitude : « Bonne soirée, Juniper. » Après lui avoir adressé un dernier petit signe de tête, il attrape son vélo, appuyé contre le mur de la cabane, et monte en selle sans tarder avant de s’enfoncer dans la nuit noire. Il était difficile de distinguer quelque chose dans l’obscurité qui enveloppait le chemin de campagne ; ça n’empêcha pas Aron de retenir un sourire sur tout le trajet qui le ramena chez lui.
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